En France, depuis maintenant plus de 65 ans, existe l’obligation de décoration des constructions publiques. Limitée aux bâtiments du ministère de l’Education nationale lors de sa création en 1951, elle a été élargie et s’impose aujourd’hui à la plupart des constructions publiques de l’Etat et à celles des collectivités territoriales.
Ce dispositif, qui est né de la volonté d’encourager la création contemporaine et de sensibiliser le public, reste pourtant encore méconnu de nombreux professionnels et collectivités.
Nous vous exposerons, dans les grandes lignes, ce dispositif et ses conditions d’application.
Présentation du dispositif
L’obligation de décoration des constructions publiques communément dénommée « 1% artistique » ou encore « 1% culturel », est une procédure spécifique de commande d’oeuvres d’art, qui impose aux maîtres d’ouvrages publics de consacrer un pour cent du coût de leurs constructions à la commande ou l’acquisition d’une œuvre d’un artiste vivant spécialement conçue pour le bâtiment considéré.
Le cadre légal du dispositif, textes de référence
Le décret n°2002-677 du 29 avril 2002 relatif à l’obligation de décoration des constructions publiques encadre cette obligation pour l’Etat et ses établissements publics administratifs.
L’article L1616-1 du code général des collectivités territoriales quant à lui s’applique aux communes, départements et régions.
Enfin, une circulaire du 16 août 2006 a apporté des précisions sur sa mise en œuvre.
Les opérations relevant de l’obligation du « 1% »
Le dispositif du 1% artistique est obligatoire pour :
- la construction ou l’extension de bâtiments publics,
- la réhabilitation de bâtiments publics, en cas de changement d’affectation, d’usage ou de destination.
Ce dispositif ne s’applique qu’aux opérations qui sont assurées par :
- l’Etat ou ses établissements publics (autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial) et leur mandataire ;
- les établissements publics de santé (seulement les trois établissements nationaux cités par le décret à savoir le centre hospitalier national d’ophtalmologie des Quinze-Vingts ; l’établissement public national de Fresnes et l’hôpital national de Saint-Maurice dans le Val-de-Marne). Toutefois, la circulaire de 2006 encourage les autres établissements de santé a mettre en place spontanément le 1% artistique dans la mesure des moyens disponibles ;
- les collectivités territoriales (ou leurs groupements) pour leurs domaines de compétences (bibliothèques, collèges, lycées, etc.), mais uniquement concernant les constructions neuves.
Les opérations immobilières relevant des ministères de l’intérieur, de la défense sont exclues de ce dispositif.
Oeuvres d’art concernées
Les œuvres susceptibles d’être commandées sont les œuvres d’art originales, plastiques et graphiques entrant dans les catégories définies aux 7° à 10° de l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle.
Il peut s’agir d’oeuvres de dessin, de peinture, de sculpture, de gravure, de lithographie, aussi bien que d’oeuvres graphiques et typographiques, d’oeuvres photographiques, d’oeuvres utilisant la lumière et d’oeuvres appartement à la catégorie des arts appliqués.
Il peut s’agir en outre d’oeuvres utilisant de nouvelles technologies ou faisant appel à d’autres interventions artistiques, notamment pour l’aménagement d’espaces paysagers, la conception d’un mobilier original ou la mise au point d’une signalétique particulière.
Le dispositif du 1% artistique peut financer :
- la conception, la réalisation, l’acheminement et l’installation des œuvres et les taxes afférentes ;
- les indemnités versées aux artistes dont l’oeuvre n’a pas été choisie ;
- les frais de publicité de la commande.
Sont éligibles au dispositif tous les artistes, français ou étrangers, qui respectent les obligations sociales, fiscales et déclaratives.
Assiette et mode de calcul du 1%
Le dispositif du 1% artistique est calculé sur le montant prévisionnel hors taxe de travaux exprimé lors de la remise de l’avant-projet définitif (APD), dans la limite de 2 millions d’euros.
Sont exclues de la base de calcul les dépenses de voirie et réseaux, d’équipement mobilier, les études de géomètre et de sondage.
Si le montant est inférieur à 30 000€ HT, le maître d’ouvrage peut, après avis du maître d’oeuvre, de l’utilisateur de l’ouvrage et du directeur régional des affaires culturelles (Drac), choisir d’acheter une œuvre existante auprès d’un ou plusieurs artistes vivants.
La procédure
Un comité artistique composé du maître d’ouvrage, du maître d’oeuvre, de l’utilisateur du bâtiment, du directeur régional des affaires culturelles (Drac) et de trois personnalités qualifiées dans le domaine des arts plastiques ; élabore le programme de la commande artistique.
L’appel à candidature doit faire l’objet d’une publicité adaptée (diffusion internet, voie de presse, affichage…).
L’avis de publicité doit indiquer :
- le programme de la commande, notamment la nature et l’emplacement de la réalisation envisagée,
- le nombre d’artistes consultés,
- les conditions de dépôt des candidatures (délais, documents à fournir)
Le dossier de candidature doit comprendre :
- des documents artistiques (CV, lettre de motivation, catalogue etc.),
- des documents administratifs (lettre de candidature DC1, déclaration du candidat DC2, attestation sur l’honneur de non-condamnation pénale)
La personne responsable du marché arrête son choix après avis du comité artistique par une décision motivée. Elle en informe l’ensemble des candidats.
Les artistes non retenus reçoivent une indemnité.
L’artiste et le maître d’ouvrage doivent signer un contrat qui fixe les conditions de réalisation, d’installation, de maintenance et de rémunération.
L’artiste bénéficie d’un droit au respect de son œuvre dont le commanditaire ne possède que le support matériel. Déplacer l’oeuvre ou la modifier exige l’accord de son auteur.
Enfin, le maître d’ouvrage, diffuseur de l’oeuvre est tenu de verser aux organismes de perception des cotisations sociales des artistes auteurs (Maison des artistes par exemple) une cotisation correspondant à 1% de toute rémunération brute hors taxe versée à l’artiste.
Sanction en cas de non-application du dispositif
Le non-respect de ce dispositif n’entraîne aucune sanction.
Cependant, il est important que les collectivités et les professionnels sensibilisent le public à la création contemporaine.
De plus, la collectivité et le maître d’ouvrage peuvent valoriser leur image en intégrant l’art à leur projet de construction car l’art embellit. On peut citer à titre d’exemple l’oeuvre la Portée de Daniel Buren réalisée en 2005 lors de la rénovation par l’agglomération de Montpellier du Musée Fabre (photo en illustration de l’article).